La science dans votre jardin

Publié originalement le 13 mars 2015

Faire le lien entre ma recherche et la vie de tous les jours est parfois difficile. Pourtant, les effets associatifs entre les plantes pourraient être utiles dans votre potager! Comme c’est le temps des semis, peut-être pourriez-vous régler vos problèmes d’insectes ravageurs par une solution toute naturelle…

En effet, mon doctorat s’intéresse à comment une plante accompagnatrice peut modifier la susceptibilité à la prédation par le cerf. Cette notion peut être également appliquée aux insectes qui mangent vos feuilles de laitues. Planter des plantes précises pourrait protéger vos légumes! Une étude de 1972 [1] a démontré que les plants de tomates pouvaient protéger les choux de certains coléoptères (Phyllotreta cruciferae). Le mécanisme derrière cette protection est élégant : la tomate dégage des composés chimiques volatils qui nuisent à l’insecte et l’empêche de trouver les plants de choux. Dans d’autres cas, la plante accompagnatrice peut attirer les insectes à elle et c’est donc elle qui sera consommée. Ou encore, la plante accompagnatrice peut attirer les prédateurs de l’insecte. Bref, vous engagez des mercenaires pour combattre l’ennemi.

Bon, mes études théoriques se basent sur des concepts pouvant être utilisés par tout le monde. Mais l’application est en réalité un peu plus complexe (surtout que je ne suis pas une experte en jardinage). Il vous faudra connaitre l’ennemi à abattre et trouver quelle plante peut le neutraliser. J’ai trouvé quelques sites intéressants à ce sujet en anglais (1). Si vous connaissez des trucs, j’aimerais bien que vous me les disiez!

Bon jardinage!

(1) http://www.oisat.org/control_methods/cultural__practices/trap_cropping.html,

http://www.garden.org/ediblelandscaping/?page=201007-how-to

1. Tahvanainen, J.O. and R.B. Root, The influence of vegetational diversity on the population ecology of a specialized herbivore, Phyllotreta cruciferae (Coleoptera: Chrysomelidae). Oecologia, 1972. 10(4): p. 321-346.

Succès, bonheur et études supérieures

Publié originalement le 3 mars 2015

La semaine passée a été ensevelie sous les choses à faire avec mon retour du terrain. C’était excitant, stimulant, épuisant! J’ai tout de même pris le temps d’assister à une formation donnée par Serge Larivière, un biologiste et administrateur aux multiples facettes. Le sujet : comment se démarquer et réussir en biologie tout en étant heureux.

Ça tombe bien, car je veux réussir en biologie et je veux être heureuse. Serge Larivière a confirmé certaines idées que j’avais et m’en a donné de nouvelles. Une chance que j’ai pris ce temps d’arrêt! J’aimerais vous en faire profiter en résumant les trucs qui me sont apparus comme étant essentiels.

Connaître

C’est un point qui est revenu à plusieurs reprises. Si on veut arriver à sa carrière de rêve, il faut se connaitre (ses buts, ses valeurs, ses faiblesses) et connaitre le marché du travail que l’on vise. Quelles sont les options qui s’offriront à moi? Quels sont les salaires offerts? Malheureusement, les biologistes ne sont pas seulement nuls en maths et en statistiques, mais également en finance (1). Pourtant, on mange comme les autres, on achète des maisons comme les autres… il serait temps qu’on s’intéresse à notre avenir comme les autres professionnels. Connaître, c’est aussi savoir comment fonctionne le système. On peut ne pas être d’accord avec le système au mérite basé sur le nombre de publications (et je suis en désaccord!), mais si on ne joue pas les règles du jeu, on n’obtiendra rien. Selon moi, il y a des moyens de travailler à changer le système tout en l’utilisant.

Bâtir activement son CV

Quand avez-vous regardé votre CV pour la dernière fois? Est-il à jour? Quelles expériences vous manquent pour être compétitif ? Selon monsieur Larivière, les gens qui travaillent leur CV ont un plus beau CV. Il faut savoir le pourquoi de chaque information qu’on y écrit et combler nos lacunes en allant chercher l’expérience nécessaire.

Travailler son efficacité

Dans votre doctorat ou votre maitrise, obtiendrez-vous une mention pour le nombre d’heures passées au lab ? Non. Alors, pourquoi rester devant votre ordinateur lorsque vous n’êtes plus efficace? Dans votre vie professionnelle, vous serez évalué aux résultats et non à l’effort que vous aurez fourni. En augmentant son efficacité, on a plus de temps pour d’autres projets professionnels ou personnels. Et cela inclut du temps pour se reposer et s’amuser. Recharger ses batteries permet d’être plus efficace. En fait, ça fait longtemps que je veux vous l’avouer: je ne travaille pas les soirs et la fin de semaine.

Eh oui… et pourtant, mon doctorat avance bien et j’ai un tas de projets motivants. Ces pauses me permettent d’arriver heureuse le lundi matin, prête à travailler!

Je pourrais écrire 3 pages de plus avec les trucs appris lors de cette formation. Mais, je n’ai plus le temps, il faut que j’aille travailler mon CV.

(1) Bon, c’est un cliché, mais qui est assez bien supporté par la réalité…

Travaux de terrain : trucs pour en tirer le maximum!

Publié originalement le 21 janvier 2015

Ça fait maintenant 7 ans qu’une partie de mes étés (et hivers) se déroule exclusivement dehors, à collecter des données. En biologie et dans d’autres domaines (foresterie, agriculture, géographie…), les données essentielles à un projet de recherche sont en partie récoltées à l’extérieur, souvent en région éloignée. Bien que Découverte ou le Code Chastenay nous renvoie une vision de chercheurs en veste blanche dans des laboratoires, ma vision de la collecte de données est tout autre. Elle comprend bouette, pluie, balades en pick-up truck.

Certains d’entre nous sont doués pour ce type de travaux. Disons que je préfère les organiser plutôt que les réaliser. Mes étés de terrain m’ont quand même donné les plus beaux moments de mes études, dans des environnements magnifiques. Au fil des années, j’ai accumulé quelques trucs pour m’assurer le succès de mes campagnes de terrain. Sans données, pas de doctorat!

Ton terrain, tu planifieras

Ça semble évident, mais c’est quand même une étape bâclée par plusieurs. On pense facilement au matériel et aux ressources humaines nécessaires. C’est un bon début, mais ce n’est pas tout. Si votre projet n’en a pas déjà un, pensez à rédiger un protocole qui répondra aux questions suivantes :

  • Que faut-il faire?
  • Comment?
  • Quand?
  • Quel est le matériel requis pour chaque tâche?
  • Où est-ce que les données récoltées seront transcrites?
  • Qui sont les personnes responsables de chaque tâche?

Un tel protocole assurera la bonne conduite des travaux, même en cas d’une absence imprévue de votre part. Il permettra également la reproductibilité de vos travaux. Je fais toujours valider mes protocoles par mon directeur et mon codirecteur, qui peuvent commenter et améliorer mes méthodes avec leur expérience.

Aux imprévus, tu t’adapteras

Je suis organisée, j’aime planifier et contrôler les évènements. Mais le terrain est plein d’imprévus, comme cette fois où la plantation de pins blancs où je devais prendre mes données ne présentait aucun pin blanc. Ou ces moments où la mauvaise température peut nous garder à l’intérieur quelques jours. Avant le départ, pensez à ce qui pourrait arriver et essayez d’envisager des solutions. Durant le terrain, fixez-vous des objectifs réalistes et révisez-les au fur et à mesure, en fonction des conditions. Et le plus dur, relaxez! Il y a des choses contre lesquelles on ne peut rien faire et il faut apprendre à vivre avec. Parfois, un imprévu ou une erreur peut mener à un autre projet ou à une autre découverte.

De ton équipe, tu prendras soin

Une campagne de terrain est souvent composée d’un étudiant gradué responsable des travaux, avec des assistants (étudiants au baccalauréat, stagiaires internationaux, stagiaires de CÉGEP). Vous aimez votre sujet et vous pourriez passer 10 heures par jour à mesurer du broutement de cerf, mais pas votre équipe. Prévoyez des congés, des journées raisonnables. Motivez-les en leur expliquant pourquoi vous faites ces travaux. J’aime beaucoup faire une liste des tâches à faire et les cocher au fur et à mesure avec l’équipe.

C’est ce à quoi j’ai pensé dans ces dernières journées, sous la pluie de janvier et la neige, en espérant vous aider à préparer vos prochains travaux! Quels sont vos trucs?

2015 commence en grand!

Publié originalement le 8 janvier 2015

C’est si motivant, les débuts d’année! Plusieurs projets se réaliseront dans mon doctorat : mise en ligne d’un preprint, soumission d’un article pour publication prochainement, séminaire de mi-parcours, congrès et même un stage à l’international. J’ai hâte de vous parler de tous ces projets et j’espère que vous continuerez à lire mon blogue. Nouvelle intéressante cette semaine : j’aurai ma semaine sur Biotweeps, un blogue, compte Twitter et une page Facebook donnant la parole à un nouveau biologiste chaque semaine (1). J’ai bien hâte d’y parler de relations plante-herbivore, de libre accès, de la place des femmes en science ainsi que de l’intérêt à écrire sa recherche en français.

2015 commence rapidement pour moi, car je quitte le confort douillet du bureau pour l’île d’Anticosti lundi prochain. Si vous avez lu mon dernier billet avant Noël (2), vous savez que je travaille sur les relations plante-herbivore, en utilisant comme modèle d’étude le cerf de Virginie. Plus spécifiquement, je cherche à comprendre comment la présence d’une plante accompagnatrice peut modifier la susceptibilité au broutement d’une plante. Bref, si je place une épinette à côté d’un sapin, sera-t-elle plus ou moins broutée par le cerf?

Et c’est exactement ce que je m’en vais faire. Je vais aller en forêt placer des branches côte à côte, par exemple 2 branches d’épinette ou de bouleau entourant une branche de sapin. Chaque matin, je placerai de nouvelles branches. Le lendemain, j’irai les reprendre pour dénombrer le nombre de bouchées prises par les cerfs. C’est un type d’expérience qui a déjà été fait auparavant [1], mais surtout avec des animaux en enclos. Moi, je mise sur la collaboration des cerfs en liberté. En comparant la consommation en présence d’épinette à celle en présence de bouleau, je mesurerai l’effet d’une plante accompagnatrice sur la susceptibilité au broutement du sapin.

Je tenterai de bloguer durant ce mois de terrain. Ça me permettra de vous expliquer pourquoi j’ajoute de l’urine de coyote à ce dispositif.

(1) https://biotweep.wordpress.com/schedule/

(2) Mettons que vous n’auriez pas lu : http://survivreasondoctorat.blog.com/2014/12/17/la-metaphore-du-buffet-mon-projet-de-doctorat/

1. Rautio, P., et al., Spatial scales of foraging in fallow deer: implications for associational effects in plant defences. Acta Oecologica, 2008. 34: p. 12-20.

La métaphore du buffet : mon projet de doctorat

Publié originalement le 17 décembre 2014

Voici mon premier billet sur ma recherche! (1) Commençons par spécifier que je suis une écologiste spécialisée dans les relations plante-herbivore. Plus spécifiquement, j’étudie la sélection des ressources alimentaires d’un grand mammifère, le cerf de Virginie (Odocoileus virginianus) et comment sa sélection est influencée par les plantes accompagnatrices.

Si vous ne connaissez pas le domaine, sachez que plusieurs chercheurs et études se consacrent à la sélection de la ressource par les herbivores. C’est logique : l’utilisation des plantes par les herbivores peut entrer en compétition avec notre propre utilisation de ces ressources. Et comme les populations de grands herbivores sont en augmentation dans le monde, il y a génération de conflits entre la faune et les populations humaines [1]. Plusieurs recherches se concentrent également sur l’influence des plantes accompagnatrices (les plantes voisines d’une plante d’intérêt) sur la sélection de la ressource par les herbivores. Avec le temps, j’ai développé une métaphore sur l’impact de ces plantes accompagnatrices sur le risque d’une plante d’être consommée.

Disons que vous adorez le cheddar, vous aimez les olives et vous détestez le brocoli. On est à un party de Noël et je suis intéressée par la probabilité que vous mangiez des olives. Dans le buffet, si les olives sont placées à proximité du cheddar, cela pourrait augmenter cette probabilité : vous allez vous tenir dans le secteur du buffet avec fromage et ingérer des quantités incroyables de cheddar et d’olives. Au contraire, si les olives sont près du brocoli, la probabilité de manger des olives pourrait diminuer. Juste à voir le brocoli, vous avez un haut-le-coeur et vous évitez cette section du buffet. Bien entendu, c’est une simplification de l’effet d’une plante accompagnatrices. L’effet d’une plante préférée et d’une plante évitée peut être inverse à celui décrit ci-dessus, mais ce sera le sujet d’un autre billet.

Certains des cerfs que j’étudie sont dans un système très simple, l’ile d’Anticosti (2). Sur l’île, il y a 3 espèces d’arbres principales. Nous pouvons les classer selon l’ordre de préférence du cerf pour ces espèces : bouleau > sapin baumier > épinettes. Les objectifs de gestion et conservation pour l’île visent à augmenter la régénération en sapin (Abies balsamea), qui est présentement surbrouté. Pourquoi ne pas utiliser les espèces accompagnatrices pour modifier la probabilité qu’un cerf consomme les sapins? Certains chercheurs ont proposé des initiatives de ce type dans d’autres systèmes [par exemple: 2]. Et c’est en partie pourquoi mon projet a été lancé.

Et voilà, je vous ai expliqué la métaphore du buffet, qui résume de façon simplifiée mon projet de doctorat. Une fois ce concept expliqué, je pourrais vous relater le travail de terrain que je m’apprête à faire en janvier : placer des branches dans le bois et noter ce que le cerf consomme. Spoiler: cette expérience implique de l’urine de coyote.

(1) Vous pouvez partager avec vos amis scientifiques anglophones avec ce lien/You can find the English version of this post here:

http://survivreasondoctorat.blog.com/2014/12/17/the-buffet-metaphor-for-my-ph-d/

(2) Un autre sujet futur !

1. Côté, S.D., et al., Ecological impacts of deer overabundance. Annual Review of Ecology Evolution and Systematics, 2004. 35: p. 113-147.

2.Aerts, R., et al., Restoration of dry afromontane forest using pioneer shrubs as nurse-plants for Olea europaea ssp cuspidata. Restoration Ecology, 2007. 15(1): p. 129-138.

The buffet metaphor for my Ph.D.

Publié originalement le 12 décembre 2014

So this is my first blog post about my research (1) and let’s start by stating that I am an ecologist interested in plant-herbivore relationships. More specifically, I am studying how the feeding choices of a large mammal, the white-tailed deer (Odocoileus virginianus) are influenced by neighboring plants (we’ll get to that).

For those unfamiliar with the domain, there is a large part of the literature concerned with feeding choices of herbivores. This is relatively unsurprising: herbivore’s use of plant can compete with our uses. And large herbivores populations are increasing worldwide, thus creating conflict between wildlife and human populations [1]. There is also a large interest in ecological studies about the influence of neighboring plants on feeding choices. My best explanation of the impact of neighboring plant on the risk of being eaten involves a buffet metaphor.

Let’s say you love cheddar, you like olives and you hate broccoli. You are at a Christmas party and we are interested in knowing what is the probability you will eat olives. In the buffet, if the olives are placed close to the cheddar, it might increase this probability: you will stick in that part of the buffet and eat lots of cheddar and olives. On the contrary, if olives are close to the broccoli, this could reduce the probability for you to eat olives. Just seeing broccoli, you will avoid that section of the buffet. This is highly simplified and there are also cases where the influence on probability is reversed. But this will be the subject of another blog post.

Some of the white-tailed deer I’m studying are in a very simplified system, Anticosti Island (2). There are only 3 main tree species and in order of deer preference: birch > balsam fir > spruce. The management objective is to improve balsam fir (Abies balsamea) regeneration, as it is presently over-browsed. So, hey, why not using neighboring species to modify the probability of a deer eating a fir ? Researchers proposed those kinds of initiatives [for an example: 2] in other systems. And that’s partly why my project was launched.

So that was the buffet metaphor I frequently use for explaining my Ph.D. Now that you understand the concept, I will be able to explain in January the fieldwork I will be doing : placing branches in the wood and observing what deer are eating. Oh, and it involves coyote urine.

(1) And incidently, my first in English. If you find outrageous grammar mistakes, please comment and I will rectify. You can find the French version of this post here:

http://survivreasondoctorat.blog.com/2014/12/17/la-metaphore-du-buffet-mon-projet-de-doctorat/

(2) Another futur subject !

1.Côté, S.D., et al., Ecological impacts of deer overabundance. Annual Review of Ecology Evolution and Systematics, 2004. 35: p. 113-147.

2.Aerts, R., et al., Restoration of dry afromontane forest using pioneer shrubs as nurse-plants for Olea europaea ssp cuspidata. Restoration Ecology, 2007. 15(1): p. 129-138.

Du blogue vers la vie réelle

Publié originalement le 10 décembre 2014

Vous vous souvenez de mon billet Rien qu’une fois, sur le terrain : harcèlement sexuel et milieu académique? Peut-être, car c’est mon billet qui a été le plus lu jusqu’à maintenant.

Grâce à la magie de Twitter, ce texte a fini par atterrir dans les mains de ma directrice de programme et de ma directrice de département. Ce qui a généré une rencontre durant laquelle nous avons discuté de ce qui pourrait être fait en terme de sensibilisation au département de biologie.

Bref, je ne croyais pas en commençant ce projet de blogue qu’il pourrait influencer ma vie académique «réelle ». Mais c’est génial! J’aime beaucoup l’idée qu’avec un geste anodin, soit écrire sur mes idées, je puisse avoir une influence a plus grande échelle. Et merci à François Gagnon de m’avoir incitée à partager ce dénouement avec vous.

En conclusion, je vous inviterais à partager mon expérience au niveau de votre département ou de votre faculté. Il reste énormément à faire en terme de prévention du harcèlement sexuel en milieu académique.

Comment trouver un projet de recherche?

Publié originalement le 4 décembre 2014

Mise en contexte : je suis présidente du Chapitre Étudiant de la Wildlife Society de l’Université Laval. Notre association, qui réunit des étudiants intéressés par la gestion et conservation, a tenu un 5 à 7 la semaine passée (restez avec moi, c’est pertinent). Sous l’influence d’étudiants motivés et d’une belle pinte de bière, j’ai accepté de faire une formation pour les gens de premier cycle sur comment trouver une maitrise. Tant qu’à préparer une formation là-dessus, autant transformer le tout en billet de blogue!

Il faut que je l’avoue, je suis un peu mal à l’aise avec le titre de cette formation. Trouver un projet de recherche dépend énormément du domaine, du pays et c’est une expérience différente pour tout le monde. Je ne possède pas la vérité absolue et mes conseils seront particulièrement valables pour les gens qui recherchent une maitrise ou un doctorat au Québec en Biologie. Tout de même, tentons de dégager certains faits en regardant différents parcours suivis par de réels étudiants. Je ne les nommerai pas, mais sachez que je base mon texte sur l’expérience de plusieurs collègues et amis.

Dans mon cas, j’ai été assistante de terrain pour une chaire de recherche en 2008. Un des chercheurs de cette chaire est spécialisé en relation plante-herbivore, un sujet qui m’intéressait à cause de ce premier emploi. Je suis allée discuter avec lui de projets de maitrises possibles. Il avait un projet de prévu et j’ai été choisie. Bref, j’avais une expérience en recherche de base, on avait déjà été en contact et en plus, j’avais le potentiel pour recevoir une bourse. J’appelle cette façon de trouver un projet la voie dorée. C’est la voie facile que peuvent se permettre les étudiants « boursables ». Ces étudiants ont plus de choix et dans certains cas, ils peuvent même créer un projet avec un professeur. La vie est facile pour eux, mais ils peuvent tomber dans le piège d’accepter le premier projet qui passe, sans réfléchir à leur intérêt pour le sujet et à leur qualité de vie dans ce laboratoire.

Pour les étudiants qui sont dans la moyenne et qui n’ont pas nécessairement la possibilité d’obtenir une bourse, la voie classique consiste à lancer plusieurs courriels à des chercheurs dont le domaine les intéresse. À la suite d’entrevues avec ces chercheurs et selon la disponibilité de projets de recherche avec financement, ces étudiants trouveront probablement un projet. En biologie (1), un projet de recherche sans bourse est pratiquement impossible à réaliser. Vous ne pouvez travailler et faire une maitrise et un doctorat dans un temps raisonnable…à moins d’être hyperactif/épuisé.

Finalement, certains étudiants n’ont pas un dossier scolaire reluisant. Peu importe la raison, les bonnes notes n’étaient pas au rendez-vous et cela rebute plusieurs chercheurs. J’ai un profond respect pour les étudiants qui ont ce parcours. Leur voie vers un projet de recherche requiert beaucoup de volonté. Ils devront multiplier les expériences pertinentes en recherche (terrain, laboratoire), soigner leur réseau de contacts, contacter de multiples professeurs et les relancer fréquemment. Je connais plusieurs étudiants qui ont eu ce parcours et qui ont réussi à trouver une maitrise qui leur convient.

Terminons par quelques conseils généraux :

  • Cultivez les expériences en recherche : emploi de laboratoire, auxiliaire de terrain. Certaines universités offrent des cours d’initiation à la recherche. Vous pouvez aussi vous impliquer dans des organismes pertinents qui vous donneront une meilleure expérience dans votre domaine. Souvent, ces emplois rapportent moins d’argent, mais ils vous permettront peut-être d’avoir la carrière de vos rêves.
  • Créer votre réseau de contacts : parlez à des étudiants aux cycles supérieurs, faites du bénévolat dans des congrès pertinent, entrez en contact avec des chercheurs! Beaucoup de projets ne seront jamais affichés et le bouche-à-oreille peut vous aider.
  • Pourquoi voulez-vous faire une maitrise? Est-ce que la maitrise est réellement la seule façon d’obtenir l’emploi de vos rêves? Allez-vous être heureux dans ce milieu? Faites un peu de ménage dans vos objectifs avant de commencer le processus.

Il y a autant de parcours universitaires que d’étudiants et il me semble que c'est très encourageant !

« Les chanceux sont ceux qui arrivent à tout… Les malchanceux sont ceux à qui tout arrive. »

— Eugène Labiche

(1) Je crois pouvoir étendre cette affirmation aux sciences pures et naturelles…

Je suis une professionnelle, moi aussi !

Publié originalement le 30 septembre 2014

Je ne vous l’ai pas dit, mais je suis biologiste. Je n’ai pas d’ordre professionnel, de badge ou de médaille pour le prouver. Je considère que mon baccalauréat en biologie fait de moi une biologiste, car il n’y a aucune norme pour indiquer qui est biologiste et qui ne l’est pas. Nous n’avons pas d’ordre professionnel, simplement une association de laquelle nous pouvons être ou ne pas être membre (ABQ, l’Association des Biologistes du Québec). Est-ce que c’est un problème?

À voir cet article du Journal de Montréal (1), la réponse semble être oui. Dans le dossier des forages au nord de Cacouna, les considérations d’une biologiste travaillant au ministère de l’Environnement auraient été mises de côté. Je ne m’avancerai pas plus loin sur ce sujet, car je ne suis pas journaliste et je n’ai pas la prétention de rapporter tous les faits. Par contre, je vais profiter de l’occasion pour parler des biologistes et de leur quête de reconnaissance ainsi que des ordres professionnels. C’est un peu en dehors de mes sujets habituels, mais c’est mon blogue, c’est moi qui décide! Le sujet est aussi en dehors de mon champ de compétence. Si je fais une erreur, ne vous gênez pas pour commenter.

Qu’est-ce qu’un ordre?

Résumons ce que l’office des professions nous apprend (2) sur les ordres professionnels :

  1. Ils ont pour mission de protéger le public.
  2. Ils contrôlent la compétence et l’intégrité de leurs membres.
  3. Ils surveillent comment leurs membres accomplissent leur profession.
  4. Ils réglementent la profession.
  5. Ils ont un pouvoir disciplinaire (plainte contre un membre).
  6. Ils développent la profession.
  7. Ils contrôlent le titre (je ne peux pas me prétendre avocat, médecin, etc.!).

Grossièrement, un ordre professionnel s’assure que la profession est effectuée dans les règles de l’art et avec éthique. Une analogie intéressante serait les guildes de guerriers dans un jeu vidéo. Vous devez compléter plusieurs missions (éducation) et respecter le code de la guilde. Bon, ce n’est pas une si bonne analogie, mais peu importe, vous comprenez le concept.

Pourquoi avoir un ordre? Et pourquoi pas les biologistes?

Le principal point motivant la création d’un ordre est la protection du public. Est-ce que les biologistes sont en contact avec le public ? Pas directement…la protection de l’environnement c’est un concept qui atteint un groupe diffus (3). L’environnement et le bien des générations futures ne touchent pas un sous-groupe clair, mais toute la société. Comme le groupe qui doit être protégé des actions des biologistes est large et mal défini, la défense active de ses intérêts est difficile. Cela pourrait expliquer en partie la difficulté des biologistes et des microbiologistes à obtenir un ordre professionnel.

En cherchant des informations pour ce billet, j’ai trouvé deux autres raisons qui peuvent expliquer cette difficulté. Dans un rapport de 1990 de l’Office des professions (4), on remarque que les compétences du biologiste peuvent entrer en conflit avec celles de professions possédant déjà un ordre professionnel (agronomes, ingénieurs forestiers, etc.). Par ailleurs, ce rapport recommande la création d’une corporation professionnelle. Il semblerait que des questions financières créent également des problèmes. En 2010, la question du salaire des biologistes employés par le gouvernement aurait nui à la demande de création d’un ordre (5).

Qu’est-ce que ça change un ordre?

Bonne question. Selon moi, avec un ordre professionnel vient une certaine reconnaissance sociale et professionnelle. L’ordre agissant comme chien de garde, on gagne en qualité et en constance dans l’exercice de la profession. Les avis d’un biologiste pourraient obtenir une aussi grande valeur que celle d’un ingénieur. Supporté par son code d’éthique et son ordre, le biologiste pourrait plus facilement repousser les influences, comme dans le cas de Cacouna (1).

Rappelons-nous toutefois que l’ordre professionnel n’est pas la panacée… pensons aux révélations récentes sur plusieurs ingénieurs.

(1) http://www.journaldemontreal.com/2014/09/25/la-biologiste-netait-pas-a-labri-des-influences-politiques

(2)  http://www.opq.gouv.qc.ca/ordres-professionnels/

(3) J’ai trouvé un super Prezi qui semble bien expliquer les intérêts diffus : http://prezi.com/qhdwn9nhwwy5/la-protection-des-interets-diffus-dans-les-pays-lusophones/  Je ne garantie pas la fiabilité de l’information par contre…

(4) http://tinyurl.com/mmeprdv

(5) http://www.abq.qc.ca/site/pdf/communiquer/LGFrancoeur-9-06-2010.pdf