Je suis une professionnelle, moi aussi !

Publié originalement le 30 septembre 2014

Je ne vous l’ai pas dit, mais je suis biologiste. Je n’ai pas d’ordre professionnel, de badge ou de médaille pour le prouver. Je considère que mon baccalauréat en biologie fait de moi une biologiste, car il n’y a aucune norme pour indiquer qui est biologiste et qui ne l’est pas. Nous n’avons pas d’ordre professionnel, simplement une association de laquelle nous pouvons être ou ne pas être membre (ABQ, l’Association des Biologistes du Québec). Est-ce que c’est un problème?

À voir cet article du Journal de Montréal (1), la réponse semble être oui. Dans le dossier des forages au nord de Cacouna, les considérations d’une biologiste travaillant au ministère de l’Environnement auraient été mises de côté. Je ne m’avancerai pas plus loin sur ce sujet, car je ne suis pas journaliste et je n’ai pas la prétention de rapporter tous les faits. Par contre, je vais profiter de l’occasion pour parler des biologistes et de leur quête de reconnaissance ainsi que des ordres professionnels. C’est un peu en dehors de mes sujets habituels, mais c’est mon blogue, c’est moi qui décide! Le sujet est aussi en dehors de mon champ de compétence. Si je fais une erreur, ne vous gênez pas pour commenter.

Qu’est-ce qu’un ordre?

Résumons ce que l’office des professions nous apprend (2) sur les ordres professionnels :

  1. Ils ont pour mission de protéger le public.
  2. Ils contrôlent la compétence et l’intégrité de leurs membres.
  3. Ils surveillent comment leurs membres accomplissent leur profession.
  4. Ils réglementent la profession.
  5. Ils ont un pouvoir disciplinaire (plainte contre un membre).
  6. Ils développent la profession.
  7. Ils contrôlent le titre (je ne peux pas me prétendre avocat, médecin, etc.!).

Grossièrement, un ordre professionnel s’assure que la profession est effectuée dans les règles de l’art et avec éthique. Une analogie intéressante serait les guildes de guerriers dans un jeu vidéo. Vous devez compléter plusieurs missions (éducation) et respecter le code de la guilde. Bon, ce n’est pas une si bonne analogie, mais peu importe, vous comprenez le concept.

Pourquoi avoir un ordre? Et pourquoi pas les biologistes?

Le principal point motivant la création d’un ordre est la protection du public. Est-ce que les biologistes sont en contact avec le public ? Pas directement…la protection de l’environnement c’est un concept qui atteint un groupe diffus (3). L’environnement et le bien des générations futures ne touchent pas un sous-groupe clair, mais toute la société. Comme le groupe qui doit être protégé des actions des biologistes est large et mal défini, la défense active de ses intérêts est difficile. Cela pourrait expliquer en partie la difficulté des biologistes et des microbiologistes à obtenir un ordre professionnel.

En cherchant des informations pour ce billet, j’ai trouvé deux autres raisons qui peuvent expliquer cette difficulté. Dans un rapport de 1990 de l’Office des professions (4), on remarque que les compétences du biologiste peuvent entrer en conflit avec celles de professions possédant déjà un ordre professionnel (agronomes, ingénieurs forestiers, etc.). Par ailleurs, ce rapport recommande la création d’une corporation professionnelle. Il semblerait que des questions financières créent également des problèmes. En 2010, la question du salaire des biologistes employés par le gouvernement aurait nui à la demande de création d’un ordre (5).

Qu’est-ce que ça change un ordre?

Bonne question. Selon moi, avec un ordre professionnel vient une certaine reconnaissance sociale et professionnelle. L’ordre agissant comme chien de garde, on gagne en qualité et en constance dans l’exercice de la profession. Les avis d’un biologiste pourraient obtenir une aussi grande valeur que celle d’un ingénieur. Supporté par son code d’éthique et son ordre, le biologiste pourrait plus facilement repousser les influences, comme dans le cas de Cacouna (1).

Rappelons-nous toutefois que l’ordre professionnel n’est pas la panacée… pensons aux révélations récentes sur plusieurs ingénieurs.

(1) http://www.journaldemontreal.com/2014/09/25/la-biologiste-netait-pas-a-labri-des-influences-politiques

(2)  http://www.opq.gouv.qc.ca/ordres-professionnels/

(3) J’ai trouvé un super Prezi qui semble bien expliquer les intérêts diffus : http://prezi.com/qhdwn9nhwwy5/la-protection-des-interets-diffus-dans-les-pays-lusophones/  Je ne garantie pas la fiabilité de l’information par contre…

(4) http://tinyurl.com/mmeprdv

(5) http://www.abq.qc.ca/site/pdf/communiquer/LGFrancoeur-9-06-2010.pdf