Microagressions: des stratégies pour agir

Oui, je suis encore en vie, mais c’est l’été et en plus d’un horaire particulièrement chargé, je dois m’amuser et me reposer. Je me suis également dit que vous aviez peut-être autre chose à faire que lire mon blogue. Et si je dois absolument me trouver une autre excuse, j’attendais également qu’un sujet intéressant vienne à moi (1).

Le voici, le voilà : comment réagir aux microagressions (2). Ok, j’en entends déjà: ah non, encore un truc social compliqué, on ne peut plus rien dire. Je vous promets que ce ne sera pas compliqué, mais je ne peux pas promettre que ça ne changera pas votre vision de la vie.

Que sont les microagressions? Ce sont des comportements ou des paroles qui démontrent une attitude hostile ou négative, qui rappellent à la personne agressée qu’elle ne fait pas partie du groupe dominant. Par exemple :

  • C’est se faire demander de gérer les crises d’un groupe parce qu’en tant que femme, on comprends mieux les émotions
  • C’est se faire dire « Toi, tu es ingénieure? Surprenant! » parce qu’on est une femme noire
  • C’est voir fréquemment des photos de femmes dénudées dans des conférences scientifiques, sans raison
  • C’est se faire raconter des jokes sexistes et racistes, mais tsé, « c’est juste des blagues ».

Ce n’est pas tous les jours qu’on a quelqu’un en coulisse, ou dans un soupirail, pour nous suggérer une réplique satisfaisante qui cloue le bec à l’adverse : « Vous ne pouvez pas être un légume, même les artichauts ont du cœur » (3). Le Dr. Amy Moors propose trois actions et deux attitudes à adopter pour répondre à une microagression. Et ne vous gênez pas, ce sont des actions qu’un allié (c’est-à-dire une personne non-agressée) peut appliquer :

  1. Poser des questions, honnêtement. Ouvrez un dialogue et il est possible que la personne réalise d’elle-même que ce qu’elle dit n’a pas de sens.
    « Pourquoi penses-tu que je ne ressemble pas à une scientifique? »
  2. Utiliser le « je ». Un bon vieux classique des relations de couple, qui permet de référer à nos sentiments et à comment on perçoit la situation. C’est un point de vu auquel le « microagresseur » n’aura peut-être pas pensé.
  3. Demander au « microagresseur » de voir la situation d’un autre point de vue.
  4. Éviter de blamer le « microagresseur ». Dire à quelqu’un qu’il est raciste fait rarement évoluer la situation, à moins d’avoir affaire à un individu d’une maturité exceptionnelle.
  5. Éviter l’humour, parce que ça peut se retourner contre vous. C’est le seul conseil sur lequel j’ai une expérience personnelle. En plus de pouvoir se retourner contre vous, l’humour est généralement mal interprété, c’est-à-dire qu’il donne l’impression que la microagression est un évènement mineur et de peu d’importance. Pour la personne qui subit, c’est peu satisfaisant et je sais d’expérience que ça n’arrête pas les microagressions. C’est quasiment une récompense pour la personne qui se voit plus ou moins conforté dans son comportement.

Lors de l’atelier SWEEET où j’ai appris tout cela, on a fait quelques mises en situation. C’est très difficile d’intervenir! Je me sens toutefois mieux outillée maintenant pour le faire.

Avez-vous d’autres suggestions? Ou est-ce que vous considérez que parler de microagressions est trop politically correct?

(1)    En fait, ce n’est pas le seul qui est venu, mais le deuxième demande un peu plus de préparation et de recherche…

(2)    Ce sujet est inspiré d’un atelier au SWEEET de la conférence de la Société Canadienne d’Écologie et d’Évolution, qui s’est tenu à Guelp en Juillet. L’atelier était donné par Amy Moors (Ph.D., Twitter : @ACMoors)

(3)    Le fabuleux destin d’Amélie Poulain. Quoiqu’en fait, la réplique n’est pas idéale puisqu’elle fait appel à l’humour.